Le marché du logement a cet avantage pour un opérateur immobilier d’être mondial, pérenne et constamment en pénurie. Quand on sait que des milliards d’euros sont actuellement injectés dans les sociétés innovantes s’attaquant aux grands enjeux de l’humanité, on peut imaginer que l’Uber de la promotion immobilière va rapidement émerger. Pour autant, les récents débâcles de la startup Katerra (fondée par des anciens de Tesla dans le but de digitaliser la construction), qui frôle la faillite après avoir levé plus de 2Mds de dollars, montrent la difficulté de créer un géant mondial capable de répondre au besoin de logements. Comment l’expliquer ?

 

La construction de logements est une industrie de prototypes

Pour répondre à la problématique du manque de logements, alors il faut évidemment construire en masse. Cela convient bien aux fonds d’investissement qui recherchent avant tout des startups pouvant se développer très rapidement (dites « scalables»), ce qui permet de maximiser la valeur de l’entreprise sur une courte période. Mais il faut bien avoir en tête que la construction de logements est une industrie de prototypes. Chaque projet est différent : d’une rue à l’autre le type de sol peut changer (et donc le coût des fondations), l’environnement peut changer (et donc le prix des logements), etc…ce qui rend extrêmement complexe la production en série de logements, au contraire de celle de voitures pour reprendre l’exemple de Tesla plus haut.

L’échec de Katerra malgré les sommes levées doit nous amener à réfléchir différemment

 

L’analogie des autres professions dites « intellectuelles »

Le fait que chaque projet de promotion immobilière soit unique donne une grosse valeur ajoutée à l’expérience : puisqu’il n’existe pas de méthode applicable à chaque projet, celui qui a beaucoup expérimenté sera toujours plus à même de gérer les impondérables à venir. Le mythe du jeune génie qui viendrait bouleverser le métier (comme Mark Zuckerberg pour Facebook) est moins applicable. Le métier est complexe, sa modélisation et donc sa digitalisation aussi. Ce raisonnement est peut-être le cas de beaucoup de professions dites « intellectuelles » :

Chirurgien Avocat Promoteur
Chaque opération est un prototype… Oui, ce sont toujours les mêmes organes qui sont opérés MAIS l’environnement du patient est chaque fois différent (âge, condition physique) ce qui rend compliqué les opérations en série Oui, il s’agit toujours d’un droit très codifié MAIS les paramètres du cas présenté sont toujours différents (client, temporalité, etc…) ce qui rend compliquée l’analyse en série de cas différents Oui, ce sont toujours des logements qui sont construits MAIS l’environnement du projet est chaque fois différent (emplacement, typologie des logements) ce qui rend compliqué les opérations en série
… donc l’expérience est fondamentale On ne laisse pas de jeunes étudiants opérer ; plus un docteur a de l’expérience, plus il a de valeur On ne confie pas de procès à enjeux à de jeunes avocats ; plus un avocat a de l’expérience, et plus il a de valeur On ne finance pas de jeunes promoteurs ; plus un promoteur a de l’expérience, et mieux il sait capter la valeur

 

Comment les autres professions intellectuelles atteignent-elles la « scalabilité » ?

Prenons par exemple le secteur de la santé. Il est intéressant de noter que sur le but de la santé, qui est de guérir des maladies, la technologie n’a pas servi à remplacer le docteur (trop complexe) mais à le trouver plus rapidement (Doctolib). Sur la promotion immobilière, la technologie n’est pas encore parvenue à remplacer le constructeur jusqu’à présent (cf. Katerra) pour les mêmes raisons selon moi : la solution de l’acteur unique ubérisant le marché est séduisante dans sa simplicité, mais se heurte à la complexité d’un métier difficile à appréhender et donc à modéliser via la technologie. Et si par conséquent la bonne tactique était d’ubériser le métier de manière indirecte, à la manière de Doctolib ?

 

Conclusion

Oui, mais par où commencer ? On dit souvent que pour démarrer dans la promotion immobilière il faut maîtriser une des 4 composantes suivantes : le capital, le terrain, la vente ou le savoir. Grâce à notre métier de promoteur et à notre plateforme de crowdfunding, nous maîtrisons certaines de ces composantes. Reste alors à s’attaquer aux autres sans plus tarder.